Samedi, 11 Mai

Dimanche 17 septembre. Homélie du 25ème Dimanche Ordinaire. Mgr Norbert TURINI

Installation du Fère Arnaud Blunat (op)

Le pardon : une priorité !

Sœurs et frères,

Vous l’avez compris, dans cet Evangile, Jésus fait du pardon, la priorité. Pourquoi ? A y regarder de près le sommet de l’amour c’est le pardon. Aimer va jusqu’à pardonner. C’est facile dans l’absolu, mais dans le concret, c’est autre chose. C’est pourquoi, Jésus nous offre cette parabole étonnante, totalement disproportionné, un peu surréaliste.

D’abord on peut se demander comment un roi, en bon intendant de ses biens peut renoncer à une telle dette qui représente une somme considérable l’équivalent, aujourd’hui, de plusieurs millions d’euros.

Certes dans un premier temps il impose son autorité royale en demandant le remboursement intégral de la dette. Il défend ses intérêts. De plus, ce n’est que justice puisque le serviteur la lui doit.

Et puis dans un second temps, il bascule totalement dans la compassion en se laissant émouvoir par ce serviteur, ses supplications, son appel à la patience, sa promesse de réaliser l’impossible.

Il y a comme le passage d’une distance autoritaire à une proximité salutaire.

On sent que le roi est touché au plus profond de lui-même. Et là on n’est plus dans le domaine de la possession (je veux mon argent), mais dans celui de l’abandon (je renonce à ce qui me revient de droit, qui m’appartient de fait, pour le bien de l’autre, pour son salut en quelque sorte, pour que sa vie continue).

Ce n’est pas cela l’amour ? Renoncer à ce que l’on peut avoir de plus cher (ici au sens économique du terme) pour le bien de l’autre ?

Vous imaginez toute cette dette effacée et ce serviteur qui repart libre, il en est libéré, heureux, lui, sa femme, ses enfants alors qu’il risquait d’être réduits en esclavage et leurs biens vendus. De fait, il n’aurait jamais pu rembourser une telle somme. Il revient de loin.

Comment ne pas voir dans cette parabole l’expression de la miséricorde de Dieu dont le pardon est sans mesure. Elle exprime la plénitude de son amour toujours offert à celui qui le lui demande, sans calcul mais gratuitement. « Le Seigneur est tendresse et pitié, lent à la colère et plein d’amour » dit le Psaume 145/8.

En même temps si nous avons l’esprit mal tourné, nous pouvons penser qu’agir ainsi pour ce roi, c’est un aveu de faiblesse, une perte de pouvoir en quelque sorte, puisqu’il a cédé. Où est son autorité puisqu’il a capitulé ? Quand cela va se savoir, comment pourrait-il l’imposer ensuite ? Tous ceux qui lui doivent de l’argent n’en feront-ils pas autant ?

Et puis, n’a-t-il pas été manipulé par ce serviteur fourbe, sans cœur, cupide, qui se dévoile sous son vrai jour, juste après, en réclamant à son compagnon, cette somme insignifiante de 100 pièces d’argent qu’il lui doit.

Et bien oui, Dieu se fait vulnérable, fragile en Jésus Son Fils, pour venir chercher et sauver ce qui était perdu et, nous le savons, son pardon nous ramène souvent de loin, même de très loin, nous ramène à la vie.

Il est descendu jusqu’à nous pour cela. Ainsi, il ne nous pardonne pas de loin ni de haut, mais en se faisant proche en Jésus. Il ne nous aime pas de loin, ni de haut, mais sur la Croix don suprême de l’amour.

Combien de fois Jésus le dira dans l’Evangile : « Va tes péchés te sont pardonnés » autrement dit « Toute ta dette est remise ». Jésus ira jusqu’au bout de l’amour pour le pardon de nos fautes, en donnant sa vie.

Oui, sans la miséricorde de son Maître, ce serviteur était perdu, lui et tous les siens. Il n’était plus rien et ce beau geste du maître le fait à nouveau exister, le rend à nouveau vivant. Le pardon est le sacrement

  • de la vie retrouvée,
  • de la dignité rendue,
  • de la honte effacée,
  • de la peur dépassée.

Oui pardonner c’est aimer et aimer, c’est tout donner et surtout pardonner

Dieu renonce à Lui-même, c’est-à-dire à ce qu’il a de plus précieux Son Fils pour remettre toute la dette des péchés de l’humanité et nous dire que nous sommes toujours plus grands que le mal que nous avons pu faire. Il est un Dieu libérateur qui ne nous enfonce pas dans le bourbier de nos fautes mais qui nous en délivre.

Il nous tire du néant de nos fautes pour nous faire remonter à la lumière de la vie.

Alors quelques esprits chagrins pourront dire que notre Dieu est faible et qu’un Dieu faible ne sert pas à grand-chose.

Mais cette faiblesse de Dieu est au contraire une force : celle de son amour et de son pardon. Et ce serviteur cupide n’a pas compris qu’il recevait cette force-là, non pas pour l’oublier aussitôt et la laisser filer, mais pour l’accueillir en lui et l’exercer. Ce qu’il ne fera pas.

Et ce péché est plus grave que le précédent. Autant son Maître a été capable d’annuler sa dette, autant il ne peut pas lui pardonner ce péché contre la charité.

Il ne s’est pas comporté comme un sauvé.

C’est la réponse illustrée que Jésus donne à Pierre qui lui fait dans la comptabilité : « Combien de fois dois-je pardonner ? Jusqu’à 7 fois ? » Au fond la réponse de Jésus : est simple agis pour les autres comme le Père agit pour toi. 70 fois 7 fois, c’est le sans limite de Dieu.

C’est ta responsabilité, ton devoir de le faire, sinon tu t’exclues de l’amour du Père, comme cet homme c’est exclue lui-même de la bonté de son roi, qui croyait en sa sincérité, en son repentir, qui le traitait avec compassion et humanité comme un proche.

Et nous, nous connaissons tous la dette de Pierre envers Jésus. Elle lui sera remise totalement sur le bord du lac de Tibériade non sur le mode du reproche, mais sur celui de l’amour : « M’aimes-tu ? », « Tu sais tout, Seigneur, tu sais bien que je t’aime ».

Cher Arnaud, je n’ai pas de conseils ou de consignes particulières pour vous dire comment remplir la mission que je vous confie. Je ne vais pas vous dire comment vous devez être curé. Ce serait prétentieux de ma part, moi qui ne l’ai été qu’un an comme simple administrateur paroissial à Nice. Votre frère dominicain Benoît Philippe Pekle qui a rejoint la communauté de Montpellier que je salue fraternellement, s’en souvient, puisque nous étions ensemble.

Non, vous avez les aptitudes requises pour être curé de Lattes et Maurin. Tous les paroissiens présents peuvent l’attester, non ?

J’ai simplement envie de vous dire avec toute mon affection fraternelle : placer votre ministère sous le signe du pardon et de la miséricorde. C’est la façon dont Dieu nous aime et c’est de cette façon à Lui qu’Il nous demande d’aimer.

Ce que ce roi a fait pour ce serviteur, ce que Dieu fait par son Fils, faites-le-vous-mêmes dans l’exercice quotidien de la mission. Agissez comme Lui. C’est tout.

Bien entendu, il y a et il y aura

  • des situations tordues qu’il faudra redresser,
  • des personnes qu’il vous faudra reprendre,
  • une correction fraternelle qu’il vous faudra exercer,

faites-le toujours dans cet esprit d’amour, de tendresse, de miséricorde, même si parfois il faut de la fermeté et de la rigueur.

C’est la marque du pasteur vis-à-vis du peuple qui lui est confié.

C’est ce sceau que le Seigneur imprime en vous en ce jour de votre installation. Qu’il ne s’efface jamais de votre vie.

Ce sacrement, celui de la miséricorde et du pardon du Seigneur vous l’exercez et vous continuerez à la faire. C’est un sacrement merveilleux. Le Pape François avec son ton direct précise que la confession n’est pas une « séance de tortures, où l’on inflige des coups de bâtons, mais la rencontre avec Jésus au cours de laquelle l’on touche du doigt sa tendresse » Méditation matinale Ste Marthe 29 avril 2013. Je ne peux pas mieux dire que le Pape ! AMEN.